Depuis que Hajime Tabata a promis en décembre 2014 qu’il allait proposer une nouvelle démo de Final Fantasy XV après Episode Duscae, il n’a jamais cessé de l’appeler « tech demo ». Et pour cause. Cette Platinum Demo: Final Fantasy XV qui a été mise en ligne dans la foulée de l’événement Uncovered tient en effet davantage d’une démonstration technologique que d’un aperçu réel du jeu.
Platinum Demo est la courte histoire du sommeil dans lequel fut plongé Noctis, âgé de huit ans, le jour où il fut violemment attaqué par un monstre et sauvé in extremis par son père. Ce passage à mi-chemin entre la vie et la mort se traduit sous la forme d’un périple onirique du jeune garçon, accompagné d’un petit Carbuncle plus mignon que jamais, dans quatre zones tirées de la version complète de FFXV. Chacune d’entre elles est un petit terrain de jeu donnant les clés de choses qui nous seront certainement inaccessibles en fin de compte, mais qui offrent un petit aperçu des différentes facettes du jeu. Ou plutôt, de son déploiement technologique : les niveaux sont ainsi constellés de petites dalles circulaires sur lesquelles on peut passer pour déclencher un effet ou obtenir un objet. Cela permet de changer l’heure de la journée pour tester le cycle jour-nuit et son impact sur l’éclairage, de modifier les conditions climatiques pour apprécier la qualité des effets atmosphériques, ou même de se transformer en monstre pour combattre !
Ces monstres que l’on peut incarner ne peuvent effectuer qu’une seule attaque, mais les batailles du jeune Noctis sont assez rudimentaires également, principalement puisqu’il ne peut pas utiliser les compétences d’éclipse et ne dispose que d’une petite épée et d’un marteau. Le côté enfantin totalement assumé donne à cette démo un esprit léger très plaisant. Impossible d’ailleurs de ne pas penser à Kingdom Hearts, notamment dans la pièce géante où Noctis, minuscule, doit grimper sur le mobilier pour atteindre la zone suivante. Mais pour aller plus vite, des dalles permettent au personnage de se changer en voiture ou en camion ! Une sorte d’aperçu miniature du road trip… entre deux pieds de chaises. Bien sûr, l’impression de Kingdom Hearts est renforcée par la musique de Yôko Shimomura : elle est sans surprise une petite merveille de raffinement, faite de valses élégantes et de moments mélancoliques éblouissants. Sans oublier la désormais célèbre « Omnis Lacrima », bien entendu.
La dernière zone, la place centrale d’Insomnia, est le seul segment à donner un extrait sérieux du jeu définitif, car il permet d’incarner Noctis adulte et de tester le système de combat dans sa forme actuelle, et contre un énorme géant de fer. Le système n’en reste pas moins encore incomplet, principalement car il n’y a que quelques armes et magies disponibles et que les trois autres personnages sont absents. Qu’à cela ne tienne, on peut transformer cet un contre un déjà épique en une bataille digne des premières bandes-annonces de Versus XIII en configurant le moment de la journée sur la nuit et la météo sur la pluie : sensations garanties ! C’est également l’occasion ou jamais de tester le nouveau système de changement d’arme, qui est désormais manuel et non plus automatique comme dans Episode Duscae. Quatre armes (ou magies) peuvent ainsi être associées aux quatre touches directionnelles, et modifiées en temps réel pendant les combos.
La démo permet de refaire le combat autant de fois qu’on le souhaite, et débloque même de nouvelles actions au fur et à mesure, dont les compétences d’éclipse et, bien sûr, les armes fantômes ! Après un petit peu d’acrobatie sur la façade de la citadelle, il est même possible d’obtenir des armes jusque-là inédites : l’Étoile de jet (une sorte de shuriken) et le Bouclier du Brave, qui offrent des possibilités intéressantes. La première permet d’effectuer des attaques enchaînées à bonne distance, pour éviter les assauts particulièrement violents du boss, tandis que le second donne la possibilité d’effectuer des contres puissants extrêmement jouissifs. Bien sûr, cela nécessite de bons réflexes ; une exigence qui effraie sans doute certains d’entre vous. FFXV est censé disposer de deux modes de combat, dont un pour ceux qui sont moins habitués à l’action brute, mais la Platinum Demo n’est semble-t-il pas dotée de cette fonction.
Si le nouveau système fonctionne plutôt bien pour les attaques physiques, l’utilisation des magies a elle plutôt tendance à rompre le dynamisme des batailles car il est toujours nécessaire de prendre un peu de distance pour pouvoir les lancer. Dans FFXV, les magies sont des orbes renfermant de l’énergie élémentaire qui peuvent s’équiper comme s’il s’agissait d’une arme. En les sélectionnant et en maintenant la touche d’attaque, il est possible de cibler la zone sur laquelle l’effet se déclenchera. Mais la précision du lancer est dégradée par le fait que les ennemis bougent en permanence ; la magie pourra très bien rater, et le laps de temps pendant lequel Noctis vise le rend forcément vulnérable aux attaques. Néanmoins, en tout cas dans le cas de Feu (la seule magie réelle disponible dans la démo), les flammes du sort persistent sur le terrain, ce qui permet de blesser le boss s’il se passe à travers. De plus, des barils explosifs permettent de renforcer l’explosion et de produire de gros dégâts. Le tout est de bien viser et de ne pas se retrouver pris dans une charge du géant de fer !
Cette Platinum Demo serait un quasi sans-faute si elle ne souffrait pas de faiblesses techniques, dont on a encore du mal à évaluer si elles sont inquiétantes pour la version définitive ou si elles sont simplement à attribuer au fait que la démo a été développée en deux mois à peine et que l’optimisation du jeu est loin d’être terminée. Le nombre d’images par seconde, s’il est globalement plus élevé que dans Episode Duscae, connaît toujours des chutes irrégulières. Le blog spécialisé Digital Foundry a également noté un problème d’enchaînement des frames spécifique à la PlayStation 4, qui entraîne des saccades. Ces faiblesses entravent peu les prouesses visuelles du jeu (en particulier la qualité remarquable des lumières et des effets visuels) ou sa patte artistique, mais pour qu’elles brillent de manière optimale, on est en droit d’espérer que l’expérience finale sera plus fluide et que les artefacts graphiques seront réduits au minimum. L’équipe a encore quelques mois de travail devant elle…
Il existe peut-être un autre souci. On peut en effet se demander si la Platinum Demo est réellement un bon choix de démo jouable publique, car aussi divertissante soit-elle, elle est une expérience linéaire qui donne toujours aussi peu d’idée de ce que sera l’expérience de jeu en monde ouvert qui nous est promise. Episode Duscae était même sans doute plus authentique en ce sens, malgré l’absence de la voiture. Pour un jeu qui a un aussi long passif, et encore beaucoup à prouver, une démarche décalée de ce type peut donner, notamment chez les joueurs portant un regard extérieur sur le projet, l’impression que son orientation s’est égarée quelque part. Une imprudence ?